Deliveroo France : condamnation à 375 000 euros d’amende pour « travail dissimulé »
Le | Jurisprudence des salariés
Le tribunal correctionnel de Paris condamne Deliveroo France, plateforme de livraison de repas à domicile, à une amende de 375 000 euros pour « travail dissimulé » entre 2015 et 2017. 2 anciens dirigeants écopent de 12 mois de prison avec sursis. Un appel est envisagé.
Le jugement
Deliveroo est condamné à :
- payer une amende de 375 000 euros,
- verser 50 000 euros de dommages et intérêts à chacune des cinq organisations syndicales de salariés (CGT, Union Solidaires, SUD-Commerces et services, SUD-Commerces et services Île-de-France et le Syndicat national des transports légers) qui s’étaient portées parties civiles pour « préjudice moral ».
Deux anciens dirigeants, Adrien Falcon et Hugues Decosse, sont condamnés à 12 mois de prison avec sursis.
Selon le tribunal correctionnel de Paris, l’organisation mise en place par la société sur une période courant de 2015 à 2017 constituait bel et bien une atteinte volontaire au droit du travail, par l’utilisation de milliers de coursiers officiellement indépendants mais, en réalité, subordonnés à la plate-forme.
Ces livreurs « ne constituaient qu’une variable d’ajustement permettant de disposer d’une flotte adaptée et réactive face au nombre de commandes enregistrées chaque jour. Seule la très grande flexibilité générée par les pratiques délictuelles commises et imposée assurait la pérennité du modèle », estime la justice.
« Une décision difficile à comprendre » (Deliveroo)
« Cette décision est difficile à comprendre dans la mesure où elle fait suite à six décisions favorables des juridictions civiles portant sur les mêmes années, 2015 à 2017, sur lesquelles le tribunal s’est penché. De plus, la décision rendue porte sur le modèle de Deliveroo des débuts, et n’a pas de conséquences sur la manière d’opérer aujourd’hui. Nous envisageons de faire appel lorsque nous aurons pris connaissance de l’intégralité du jugement. »
« Une victoire pour les travailleurs » (CGT)
« La CGT, partie civile aux côtés des livreurs dans ce procès, se félicite de cette victoire pour les travailleurs. La lutte contre l’ubérisation précarisant les travailleurs doit continuer. Le gouvernement doit prendre toute la mesure de cette condamnation et faire appliquer le droit français et européen, notamment en favorisant et en transposant dans le droit interne le projet de directive sur la présomption de salariat. Il s’inscrira ainsi dans un mouvement se déployant dans plusieurs États : Espagne, Royaume- Uni, Italie… qui vise à mettre fin aux dérives de l’ubérisation, en régulant le statut des plateformes. »
À travers les élections professionnelles qui se dérouleront du 9 au 16 mai 2022, la CGT, en phase avec les travailleurs des plateformes, est dès à présent en campagne, pour représenter au mieux les livreurs et gagner, avec eux, de véritables conquis sociaux pour leurs conditions de vie et de travail.