Pouvoir d’achat des salariés : modalités et décryptage de la monétisation des RTT
Par Agnès Redon | Le | Accords d’entreprise
La loi de finances rectificative pour 2022 permet aux entreprises qui le souhaitent de racheter les jours de RTT non pris par les salariés. Sandrine Delessard, juriste en droit du travail chez Comité Conseils, un cabinet de conseils et de formation spécialiste des CSE, fait le point sur ce dispositif.
Modalités du dispositif
L’article 5 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 prévoit une modalité de rachat des jours de réduction du temps du travail (RTT) par l’employeur, s’il en est d’accord.
Il est ainsi possible de demander à l’employeur de racheter tout ou partie des jours de RTT acquis du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2025.
Cette possibilité, dérogatoire aux dispositions légales, est ouverte dans toutes les entreprises, quel que soit l’effectif, pour une période de trois ans qui démarre avec effet rétroactif au 1er janvier 2022 et s’achève le 31 décembre 2025.
À savoir : les journées ou demi-journées de RTT travaillées sont payées au tarif de la première heure supplémentaire défini dans l’entreprise, soit le salaire horaire majoré de 10 % au minimum. Toutefois, les jours de RTT rachetés ne s’imputent pas sur le contingent d’heures supplémentaires.
A qui s’adresse le dispositif ?
Sont concernés par ce dispositif :
- les salariés bénéficiant de journées ou demi-journées de repos en application d’un accord ou d’une convention collective instituant un dispositif de RTT ;
- les salariés bénéficiant de jours de repos conventionnels mis en place dans le cadre d’un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine (articles L. 3121-41 à L. 3121-47 du Code du Travail).
En revanche, ce dispositif de rachat de jours de RTT ne s’applique pas :
- aux salariés en forfait jours. Ces salariés bénéficient déjà de la possibilité de renoncer à une partie de leurs jours de repos en contrepartie d’une majoration de leur salaire (minimum 10 %) ;
- aux jours ou demi-journées de repos déposés sur un compte épargne temps (CET) ;
- aux jours de repos compensateur équivalent venant en remplacement du paiement des heures supplémentaires ;
- aux jours ou demi-journées de repos soldés de tout compte.
Exonération de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu
Les rémunérations versées au salarié bénéficient du régime social et fiscal des heures supplémentaires. Ce revenu est exonéré des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu, dans la limite de 7 500 €.
Avis de l’expert : « Les employeurs s’opposent rarement à la monétisation des RTT » (Sandrine Delessard)
Pour Sandrine Delessard, juriste en droit du travail chez Comité Conseils, ce dispositif est une bonne option, surtout lorsque les salariés ont des difficultés à obtenir une augmentation de salaire :
« D’après les retours que nous avons sur le terrain, les employeurs s’opposent rarement à la monétisation des RTT. Si cela peut avoir un effet favorable sur le pouvoir d’achat des salariés, il est encore tôt pour se prononcer sur le dispositif, qui en est un parmi d’autres. Bien sûr, ce n’est pas ça qui doit se substituer aux augmentations de salaire qui sont pérennes ».
Afin de favoriser le pouvoir d’achat des salariés, Sandrine Delessard préconise la formation des représentants du personnel, « notamment pour bien connaître et comprendre la situation économique de l’entreprise ».
« En effet, les prétentions salariales doivent être réalistes et cohérentes pour se faire entendre de l’employeur. »
Par ailleurs, Sandrine Delessard observe que « l’éventail des différentes mesures, issues des négociations, est souvent méconnu des salariés ».
« Les élus doivent bien communiquer sur le sujet, pour que le résultat des négociations soit intelligible. Il s’agit de faire preuve de pédagogie et d’expliquer leurs effets concrets », précise-t-elle.