Droits des salariés

Violences faites aux femmes : les moyens d’action des élus du personnel (focus Technologia)

Par Agnès Redon | Le | Qvct et santé

Quel rôle peut jouer l’entreprise dans l’assistance et la protection des victimes de violences conjugales ? Le sujet a été abordé lors d’un webinaire le 20 juillet 2023 par Groupe Technologia, un cabinet spécialisé en évaluation et en prévention des risques.

Santé et sécurité au travail : accompagner les victimes de violences conjugales - © D.R.
Santé et sécurité au travail : accompagner les victimes de violences conjugales - © D.R.

La détection des signaux de violence conjugale 

  • « Avec en moyenne 2/3 de notre temps passé au travail, l’entreprise et le personnel ont un rôle majeur à jouer dans la détection des signaux faibles, l’accompagnement des victimes de la prise de conscience à la construction d’une nouvelle vie.
  • 42 % des femmes victimes de violences en parlent d’abord à leurs collègues. L’entreprise et les collègues de la victime ont un devoir d’assistance à personne en danger », souligne Sarah Barukh, autrice du livre « 125 et des milliers » publié en mars 2023, dans lequel 125 personnalités racontent 125 victimes de féminicides.

« Le lieu de travail est souvent le seul endroit où les victimes se sentent en sécurité. Ce n’est pas aux collègues de sortir la victime de la situation de violence dans laquelle elle est. En revanche, savoir écouter et rediriger est essentiel. » 

En ce sens, l’entreprise peut jouer un rôle important dans l’assistance et la défense des victimes de violences conjugales, estime Sarah Barukh.

  • « Il y a une double peine pour les victimes de violence. Le stress immense dû à des situations de coercition au quotidien peuvent avoir des conséquences au travail, comme des troubles cognitifs associés à l’état de sidération traumatique.
  • Si l’entreprise prend cela pour un laisser-aller, la situation peut conduire à un licenciement, par exemple pour absentéisme. Ainsi, le seul refuge qui est son travail peut être retiré à la victime. »

C’est pourquoi il est important de détecter les signaux faibles, qui sont des répercussions de cette violence.

Par exemple, le fait qu’une victime doive toujours répondre au téléphone, qu’elle change d’attitude, de vêtements, la fatigue inhabituelle, etc. Tout cela doit alerter l’entreprise, évoque Sarah Barukh.

Les leviers d’intervention 

Pour Jean-Claude Delgènes, président fondateur du cabinet Technologia, « le traitement de ces situations exige de sortir de la focale purement domestique, qui peut conduire à des situations mortelles de féminicides ».

Il rappelle que l’entreprise a une obligation de prévention sur l’ensemble des risques professionnels auxquels les salariés peuvent être exposés (loi n° 91-1414 du 31 décembre 1991).

« La principale difficulté est le traitement de ces situations le plus tôt possible, avant qu’un drame se produise. »

Les leviers d’intervention sont les suivants :

  • Consacrer une séance annuelle de CSE au sujet des violences conjugales ;
  • Veiller à ce que des sanctions soient prévues contre les hommes qui se comportent mal. « C’est une manière de faire de la prévention, d’informer que l’entreprise peut licencier une personne à partir du moment où elle est susceptible de causer un trouble. En effet, la peur doit changer de camp.
  • Le management bienveillant est important, afin que la victime s’exprime, qu’elle puisse éventuellement avoir des horaires aménagés, bénéficier d’une mobilité géographique, à condition que cela se fasse en concertation avec elle ;
  • Intégrer dans le règlement intérieur des dispositions discutées en CSE pour faire face à cette situation. »

Sarah Barukh ajoute qu’il existe d’autres actions possibles dans l’accompagnement des victimes de violences conjugales. Parmi lesquelles le fait :

  • « D’identifier les personnes référentes dans l’entreprise ;
  • D’associer l’entreprise à des réseaux externes, comme une association de soutien ou d’entraide au niveau local;
  • De mettre en place une cellule d’écoute par le biais de la DRH avec la garantie de l’anonymat pour favoriser la prise de parole des victimes. »