Droits des salariés

Santé et sécurité au travail : comment prévenir la pénibilité ? (focus Miroir Social - Technologia)

Par Agnès Redon | Le | Qvct et santé

Le dispositif de prévention de la pénibilité « rate sa cible ». C’est l’un des constats de Jean-Claude Delgènes, président fondateur du Groupe Technologia, lors d’un webinaire de Miroir Social le 26 mai 2023 : « Pénibilité, comment arrêter d’entretenir les inégalités ? ».

Pénibilité au travail : quels sont les moyens de prévention ? - © D.R.
Pénibilité au travail : quels sont les moyens de prévention ? - © D.R.

Qu’est-ce que la pénibilité au travail ?

« En dépit des réflexions menées sur la pénibilité psychique, par exemple en 2008 lors d’une commission parlementaire qui demandait sa reconnaissance, elle a été totalement écartée par la loi Touraine en 2014 », indique Jean-Claude Delgènes. 

Le président fondateur du Groupe Technologia précise les 6 critères de pénibilité pris en compte depuis 2018 :

  • Travail de nuit ;
  • Travail répétitif (à la chaîne) ;
  • Travail en équipes successives alternantes (3×8) ;
  • Travail en milieu hyperbare (sous terre ou sous l’eau) ;
  • Environnement bruyant ;
  • Températures extrêmes.

En 2018, 4 facteurs ont été supprimés :

  • Charges lourdes ;
  • Postures pénibles ;
  • Vibrations mécaniques ;
  • Exposition aux agents chimiques dangereux.

Fonctionnement du C2P

• Le compte professionnel de prévention (C2P) permet de déterminer et de référencer les facteurs de risques professionnels d’exposition d’un travailleur au-delà de certains seuils ;
• Dans ce cas, l’employeur établit une déclaration de façon dématérialisée ;
• En fonction de son exposition à ces risques, le salarié cumule des points sur son C2P.

Les effets de la pénibilité au travail

  • « La France est très en retard sur le sujet de la pénibilité au travail, notamment en matière de prévention des risques ;
  • Elle se place en queue de peloton des pays européens sur la sinistralité, elle se situe au niveau de l’Albanie, ce qui témoigne d’un relâchement de la prévention. Si on ne s’en préoccupe pas, elle ne s’améliorera pas d’elle-même ;
  • En 2019, on a enregistré en France 655 000 arrêts de travail, près de 55 000 maladies professionnelles et un nombre de morts très important. Il est essentiel de prendre à bras le corps cette réalité ;
  • Le dispositif de prévention de la pénibilité mis en place en France rate sa cible », estime Jean-Claude Delgènes.

« Concernant les effets de la pénibilité au travail sur la santé depuis le début des années 2000, les études ont montré que le stress aigu et le travail trop intense ou trop prolongé favorisent les maladies cardio-vasculaires, comme les infarctus et les AVC. Si vous travaillez plus de 55 heures par semaine, le risque d’AVC est même accru d’un tiers, ce qui est énorme. Le travail de nuit joue beaucoup sur la montée des cancers », précise Jean-Claude Delgènes.

Il est cependant difficile de prouver le lien entre ces accidents et le poste occupé.

« En effet, les AVC et les infarctus ont souvent lieu en dehors du temps de travail et sont très rarement reconnus comme des accidents du travail. Ils sont imputés à une fragilité physiologique de la personne. C’est la même chose pour les burn-out en très forte progression en France. » 

L’action du CSE

  • « Concernant le rôle du CSE, il peut agir pour évaluer la pénibilité avec le concours du médecin du travail, de l’inspection du travail, de la Carsat et d’un expert.
  • Le cabinet Technologia a également proposé que les branches calibrent les métiers à risques dans des référentiels. Cependant, les employeurs s’y sont opposés de crainte de voir de nouveaux régimes spéciaux se créer », indique Jean-Claude Delgènes

Lors des consultations récurrentes, le CSE peut décider de recourir à un expert-comptable, notamment en vue de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi (article L2315-91 du Code du travail).

Le CSE peut faire appel à une expertise ponctuelle habilitée dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État (article L2315-94 du Code du travail) notamment dans les cas suivants :

  • Lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;
  • En cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important qui modifient les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail.