Retraites : « Aucun espace de négociation sur l’aménagement de la réforme » (Michel Beaugas, FO)
« Nous avons hésité à ne pas prendre part à la concertation à cause de son format, du périmètre ou encore de la méthode de cette concertation », déclare Michel Beaugas, secrétaire confédéral au secteur de l’emploi et des retraites Force ouvrière.
Il s’exprime au sujet de la concertation entre les partenaires sociaux, qui a eu lieu le 06 mars 2025 et qui fait suite à la remise du rapport de la « Mission flash » sur la situation financière du système de retraite au Premier ministre François Bayrou par la Cour des comptes, le 20 février 2025.

Pourquoi FO a choisi de quitter la concertation ?
Nous avons hésité à ne pas prendre part à la concertation à cause de son format, du périmètre ou encore de la méthode de cette concertation.
Avec ce courrier, notre discussion n’aura aucune marge de valeur
Ce qui a achevé de nous convaincre, c’est l’envoi du courrier du Premier ministre François Bayrou aux partenaires sociaux la veille de la concertation le soir à une heure tardive, réclamant le retour à l’équilibre des comptes en 2030.
Avec ce courrier, notre discussion n’aura aucune marge de valeur : on nous dit qu’il ne faut pas augmenter le coût du travail ni entraver la compétitivité. Cela signifie qu’on ne pourra pas augmenter les cotisations. Dans ce cadre, soit on baisse les pensions, ce que nous ne sommes pas prêts à faire, soit on demande aux salariés de travailler plus longtemps. Dans un carcan pareil, il n’y a pas d’espace de négociation sur l’aménagement de la réforme des retraites.
Nous sommes instrumentalisés pour nous faire porter un allongement de la durée et de cotisation et d’un recul de l’âge de départ à la retraite. Je crains que cela laisse aux Français et aux salariés l’impression que les organisations syndicales sont complices du Gouvernement.
En revanche, dans le cadre de l’article L1 du Code du travail, avec un document d’orientation, une négociation sur quelques mois, et l’aboutissement à un ANI ou pas, nous souhaitons que des discussions soient mises en œuvre notamment sur :
- l’égalité professionnelle et salariale entre les femmes et les hommes ;
- la reconversion professionnelle ;
- la pénibilité, la formation professionnelle tout au long de la vie ;
- les entretiens de fin de carrière ;
- les temps partiels subis ; la conditionnalité des exonérations de cotisations sociales ;
- les salaires.
Quelles sont vos revendications prioritaires ?
Les revendications prioritaires concernant la réforme des retraites incluent :
- L’abrogation de la réforme des retraites, le retour à un âge de départ à la retraite de 62 ans et renégocier les modalités qui permettent d’augmenter les cotisations ;
- Un accès facilité aux reconversions professionnelles avec des droits et des financements pour permettre aux travailleurs, notamment ceux en situation de pénibilité, de se reconvertir et de rester dans l’emploi jusqu’à l’âge de départ à la retraite ;
- L’augmentation du taux d’emploi des jeunes et des seniors pour garantir que ces derniers puissent cotiser suffisamment longtemps pour assurer la pérennité du système de retraite ;
- L’amélioration des conditions de travail pour permettre à tous de travailler jusqu’à l’âge de la retraite sans être contraints de partir prématurément.
Le ministre de l’Économie Éric Lombard s’est dit favorable à une plus grande contribution des retraités au financement du système. Qu’en pensez-vous ?
Cette idée est une belle bêtise. Les retraités d’aujourd’hui ont déjà cotisé toute leur vie pour leurs pensions et il est injuste de demander aux salariés de travailler plus longtemps pour compenser un déficit qui pourrait être financé autrement.
Comment réagissez-vous à l’idée d’Amir Reza-Tofighi, président de la CPME, qui propose de supprimer trois jours fériés par an pendant lesquels les salariés travailleraient et le fruit de ce travail serait versé sur leur compte de capitalisation ?
Là encore, ce serait injuste. Compte tenu des aides et des exonérations fiscales, aux entreprises, les ressources pourraient être mieux utilisées pour financer le système de retraite, plutôt que de faire peser le fardeau sur les salariés.
La capitalisation ne ferait qu’accroître les inégalités
Surtout que cela fait plus de 15 ans dans ce pays que les entreprises n’ont pas participé à l’équilibre du régime des retraites. La capitalisation, qui pourrait être une conséquence de telles mesures, ne ferait qu’accroître les inégalités, car seuls ceux qui ont les moyens pourraient en bénéficier.