Anthony Toueilles (CGT) : « La lutte des classes, un combat profondément actuel pour les salariés »
Par Agnès Redon | Le | Syndicats
Adhérent à la CGT depuis 2016 et délégué syndical chez Orange, Anthony Toueilles trouve dans son engagement syndical une manière de faire respecter les droits des salariés en difficulté.
Il revient sur sa vision du dialogue social et sur les conséquences des ordonnances de 2017 pour la mission des représentants du personnel ainsi que la santé et la sécurité des salariés.
Quel est votre parcours ?
Je suis technicien chez Orange en charge de la réparation des câbles ADSL et fibres optiques.
- En 2016, j’ai adhéré à la CGT.
- De 2017 à 2019, j’ai obtenu mon premier mandat de délégué du personnel au CE d’Orange.
- De 2019 à 2023, je suis élu pour un deuxième mandat de délégué syndical au CSE.
Quel est le moteur de votre engagement ?
Pour éviter le renforcement de la défense des salariés et la création de gros collectifs syndicaux, les grands groupes font en sorte de sous-traiter tant qu’ils le peuvent
Face à la dégradation générale des conditions de travail, j’ai pris conscience de la nécessité de participer à la défense des salariés. Ce sont eux qui produisent la richesse d’une entreprise et qui la font fonctionner.
Compte tenu de ce que les salariés de chez Orange ont subi avec l’affaire des suicides, la solidarité syndicale est essentielle [ndlr : cette affaire judiciaire vise l’entreprise France Télécom, devenue Orange en 2013, pour harcèlement moral ayant conduit à des suicides].
Pour éviter le renforcement de la défense des salariés et la création de gros collectifs syndicaux, les grands groupes font en sorte de sous-traiter tant qu’ils le peuvent. C’est une manière de déliter les droits des salariés.
La direction Orange Île-de-France a réduit les effectifs de presque moitié depuis 2017, qui sont passés de 11 500 à moins de 6 000. Les boutiques Orange subissent le même sort, beaucoup d’entre elles passant à la GDT (Générale de Téléphone), une filiale d’Orange.
Pourquoi avez-vous choisi la CGT ?
La CGT porte des valeurs de solidarité, de partage, d’antiracisme et de lutte des classes. Ce sont des combats qui restent profondément actuels.
Quels principes appliquez-vous pour mener une négociation ?
Pour défendre l’intérêt des salariés, le rapport de force est de plus en plus nécessaire. La direction fait la sourde oreille et refuse toute négociation, même lors des dernières NAO.
Il faudrait que les syndicats soient davantage unis pour peser dans la balance et lutter avec les salariés.
Quels sont les sujets que vous portez actuellement dans vos revendications ?
Le groupe réalise de très gros bénéfices mais les salaires ne suivent pas
Les sujets prioritaires concernent notamment :
- Le partage de la valeur. Le groupe réalise de très gros bénéfices mais les salaires ne suivent pas. D’ailleurs, ce sont les personnes recevant les plus bas salaires qui bénéficient des augmentations les plus modestes, une situation qui ne peut pas s’installer dans la durée ;
- Un meilleur pouvoir d’achat des salariés par l’augmentation des salaires et la mise en place d’un treizième mois ;
- Une meilleure reconnaissance des qualifications et des compétences ;
- L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
- Un salaire minimum de 2000 euros à l’embauche.
Que diriez-vous à une personne souhaitant s’engager dans le syndicalisme ?
Afin de renforcer les luttes collectives pour la défense des droits, nous avons besoin de davantage de militants. Toutes les personnalités et les expériences sont les bienvenues.
Comment percevez-vous l’évolution du syndicalisme depuis que vous militez ?
Ces ordonnances ont voulu nous transformer en professionnels du syndicalisme, au détriment de la proximité de terrain
J’ai vécu le passage des CE aux CSE. La perte de nos moyens et de la proximité au terrain est considérable. Sur l’UI IDF, nous étions huit élus avant les ordonnances Macron, contre deux seulement à ce jour, avec le même score obtenu aux élections professionnelles. Ces ordonnances ont voulu nous transformer en professionnels du syndicalisme, au détriment de la proximité de terrain. Je pense que cela a été voulu pour nous affaiblir.
Le remplacement du CHSCT par la CSSCT est également une perte immense pour la santé et la sécurité des salariés. A cause de la réduction des moyens, il nous est impossible de remonter tous les problèmes comme avant. Par conséquent, sans le vouloir, les élus passent parfois à côté de sujets importants.
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