Violence entre représentants du personnel : l’employeur ne doit pas rester inactif
Le | Jurisprudence du cse
L’employeur ne peut pas rester inactif lorsque des faits de violence et d’intimidation sont commis dans l’entreprise par un salarié protégé, même si ces faits ont eu lieu dans le cadre de l’exercice du mandat et pendant la période de délégation syndicale, selon la Cour de cassation dans un arrêt du 24 novembre 2021.
Le contexte
Un salarié est embauché le 3 mars 1988 en qualité de commis administratif principal. Il exerce divers mandats syndicaux et de représentation du personnel de 1991 à 1997 et du mois de juin 2008 au mois de décembre 2011. Il est licencié pour faute le 22 juin 2016 et saisit le CPH (Conseils de prud’hommes) pour demander, entre autres, des dommages-intérêts, invoquant l’inaction de l’employeur face au harcèlement moral qu’il a subi d’un autre représentant du personnel.
La Cour d’appel rejette sa demande. Elle constate que le salarié a été victime d’insultes et de violences de la part du délégué syndical CGT de l’entreprise, le 20 juillet 2009, dans le couloir des locaux mis à disposition des syndicats. Le salarié a informé l’employeur de ces faits, a porté plainte et a obtenu un rappel à la loi du Procureur de la République. La société n’a diligenté aucune enquête ni pris aucune sanction et a maintenu les deux salariés dans le service.
La Cour juge que, dès lors que la violente altercation entre les deux salariés a eu lieu dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions syndicales et à un horaire où ils étaient en période de délégation syndicale et que le rappel à la loi n’est pas revêtu de l’autorité de la chose jugée, les décisions prises par la société sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel et rappelle l’article L1152-1 du Code du Travail, selon lequel aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral. Elle juge que les faits de violence et d’intimidation commis dans l’entreprise par un salarié protégé caractérisent un abus dans l’exercice du mandat et un manquement aux obligations découlant du contrat de travail, pouvant justifier le prononcé d’une sanction disciplinaire.
La circonstance que ces faits sont survenus dans le cadre de l’exercice du mandat n’est pas de nature à justifier la carence de l’employeur.
La Cour de cassation renvoie l’affaire devant la Cour d’appel, afin que celle-ci se prononce sur le harcèlement moral et les autres demandes du salarié.
Qu’est-ce que le statut protégé ?
Lorsqu’un salarié exerce une fonction représentative dans l’entreprise, il bénéficie d’un statut protégé contre le licenciement.
Les bénéficiaires sont les suivants :
• Membre élu de la délégation du CSE ;
• Candidat aux fonctions de membre élu du CSE ;
• Représentant syndical au CSE ;
• Délégué syndical.
Avec cette protection, il s’agit de s’assurer que le licenciement n’est pas en lien avec l’exercice du mandat.
Ainsi, la procédure de licenciement classique ne suffit pas : elle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail. Cette protection s’applique dès l’organisation des élections, lorsque l’employeur est informé d’une candidature ou de l’imminence d’une candidature et elle se termine 6 mois après le terme du mandat.