Dialogue social

Devoir de vigilance : un outil méconnu au service des représentants du personnel (focus Syndex)

Par Agnès Redon | Le | Syndicats

Droits humains, respect de l’environnement, santé et sécurité des personnes. Tels sont les thèmes couverts par la loi relative au « devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre » entrée en vigueur en mars 2017. La 3e Rencontre de la Métallurgie, organisée le 18 octobre 2023 par Syndex, a permis de faire le point sur ce devoir de vigilance.

Devoir de vigilance : un outil méconnu au service des représentants du personnel (focus Syndex) - © D.R.
Devoir de vigilance : un outil méconnu au service des représentants du personnel (focus Syndex) - © D.R.

Le cadre législatif

La loi du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, instaure, dans le Code de commerce, de nouvelles obligations de vigilance à l’égard des sociétés les plus importantes, qui doivent établir et mettre en œuvre de manière effective un plan de vigilance.

La loi prévoit l’engagement de leur responsabilité en cas de manquement à ces nouvelles obligations visant à prévenir les risques d’atteintes graves aux droits humains et à l’environnement, y compris lorsqu’elles sont commises par leurs filiales directes ou indirectes, en France et dans le reste du monde.

La loi impose que les mécanismes d’alerte et de recueil de signalement doivent être élaborés en concertation avec les organisations syndicales représentatives de l’entreprise.

Ce plan de vigilance comporte « les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier les risques et à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l’environnement » liées aux activités des entreprises sur lesquelles la loi exerce un contrôle. 

Les entreprises doivent suivre les cinq indications suivantes :

  • Une cartographie des risques par pays, destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques qui résultent des activités des sociétés mères ou donneuses d’ordre, de leurs sous-traitants ou de leurs fournisseurs ;
  • Des procédures d’évaluation régulière de la situation des filiales, des sous-traitants et des fournisseurs avec lesquels l’entreprise entretient une relation commerciale établie ;
  • Des actions de prévention ou d’atténuation des risques d’atteinte grave aux droits humains ou à l’environnement doivent être menées. Pour cela, des audits sociaux et environnementaux sont à établir à tous les niveaux de la chaine de valeur ;
  • Un dispositif d’alerte. En cas de risque, un dispositif de prévention et de protection de la sous-traitance doit être présenté ;
  • Un dispositif doit être opérationnel pour suivre les mesures mises en œuvre pour la prévention et l’évaluation de leur efficacité. Ainsi, un plan de vigilance doit être publié.

Un dispositif méconnu des représentants du personnel

Pour Bruno Azière, secrétaire national à l’industrie de la CFE-CGC Métallurgie, le devoir de vigilance est un outil souvent méconnu des représentants du personnel.

« Cependant, il n’est pas simple d’identifier les entreprises concernées et notre organisation syndicale milite pour le faire. Les représentants du personnel n’ont pas forcément les outils pour exercer ce devoir, surtout en 2017, lorsque les ordonnances ont réduit leurs moyens. »

Xavier Petrachi, représentant de la Fédération des travailleurs de la métallurgie (FTM) CGT, a constaté que l’essentiel des contentieux sont apportés par des ONG. Pour lui, il est regrettable que la sphère syndicale ne se soit pas vraiment emparée du devoir de vigilance.

« Alors que l’employeur doit collaborer avec les organisations syndicales représentatives, il y a une volonté du patronat d’écarter les syndicats. Le sujet de la place des sous-traitants dans le secteur industriel est par exemple un sujet sur lequel les syndicats doivent être très attentifs. »

Marc Aubry, secrétaire national de la FGMM-CFDT, observe que la plupart des entreprises qui se sont saisies de cette obligation légale font partie du secteur de la métallurgie.

« En témoigne le prix du meilleur plan de vigilance qui est décerné par le Forum pour l’investissement responsable. 3 des 6 derniers prix depuis 2018 ont été décernés à des entreprises du secteur de la métallurgie. »

Par ailleurs, Marc Aubry a constaté une montée en puissance des sujets relatifs au devoir de vigilance dans le réseau d’administrateurs salariés CFDT de la métallurgie.

  • « Les conseils d’administration sont d’ailleurs des lieux primordiaux de la construction et de la validation des plans de vigilance, qui sont de plus en plus pris en compte dans les stratégies industrielles.
  • La question qui se pose est celle de l’appropriation par les équipes. Pour ce faire, il y a un véritable enjeu dans la formation syndicale et l’accompagnement par des experts. »

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